10
09 2019

  .  Par Pascal LAURENT

Barème « Macron » : suite, mais pas fin !

Nous pensions qu'après l'avis rendu en Assemblée Plénière par la Cour de Cassation, la question de la validité du barème d'indemnités, dit "Macron", ne se poserait plus devant les juridictions de fond.

Pour mémoire, le 17 juillet 2019 (Avis Cass. 17-7-2019 n° 19-70.010), la Cour de cassation rendait un avis sur la conventionalité et du barème prévu par les dispositions de l’article L 1235–3 du code du travail issu de l’ordonnance 2017–1387 du 22 septembre 2017.

Ce texte divisait la doctrine et les praticiens, mais aussi les conseils de programmes qui soit le déclaraient conformes aux conventions internationales auxquelles à la France avait adhéré, soit le déclaraient inconventionnel.

De plus, les arguments principaux développés étaient que ce barème d’indemnités que les juges devaient appliquer en cas de licenciement sans cause et sérieuse n’était pas conforme à la fois aux dispositions de l’article 24 de la charte sociale européenne, et à l’article 10 de la Convention 158 de l’Organisation Internationale du Travail.

Ces conventions prévoient en effet que les travailleurs disposent d’un droit à percevoir une indemnité adéquate, et conforme à leur préjudice s’ils sont licenciés sans motif valable.

De nombreux Conseils de Prud’hommes avaient ainsi jugé que ce barème n’était pas conventionnel et refusaient donc de l’appliquer (notamment : Cons. prud’h. Troyes 13-12-2018 n° 18/00036 ; Paris 22-11-2018 n° 18/00964 ; Amiens 19-12-2018 n° 18/00040 ; Lyon 21-12-2018 n° 18/01238 ; Grenoble 18-1-2019 n° 18/00989 ; Bordeaux 9-4-2019 n° 18/00659 ; Montpellier 17-5-2019 n° 18/00152).

Après cet avis rendu en Assemblée Plénière par la Haute Juridiction, nombreux sont ceux qui pensaient que la question était tranchée.

 

Mais, la saga judiciaire ne semble pas pour autant terminée ...

En effet, par jugement du 22 juillet 2019, le Conseil de Prud’hommes de Grenoble vient de refuser de se conformer à l’avis de la Cour de Cassation estimant que le préjudice subi en l’espèce par le salarié était, compte tenu notamment de son ancienneté et de son âge, supérieur à la fourchette haute de l’article L 1235-3 du Code du Travail (Cons. prud’h. Grenoble 22-7-2019 n° 18/00267).

Beaucoup attendent donc avec impatience les décisions des juges d’appel qui doivent être rendues dans les semaines à venir.

Mais, il est fort probable que toute décision qui serait contraire à l’avis de la Cour de Cassation, et qui serait porté devant la chambre sociale de cette dernière serait cassé, car elle se conformerait à cet avis du 17 juillet 2019.

N’oublions pas aussi, qu’au plan international, des recours ont été déposés par des organisations syndicales devant la Cour européenne des droits de l’Homme et de l’OIT, ainsi que devant le Comité européen des droits sociaux (CEDS), organe de contrôle de l’application de la Charte sociale européenne.

Ce même CEDS a d’ailleurs déjà condamné un dispositif de plafonnement des indemnités de licenciement injustifié instauré par la législation Finlandaise (CEDS 8-9-2016 n° 106/2014), assez proche de celui en vigueur en France.

Il ressort de cette décision que le salarié injustement licencié doit percevoir une indemnité d’un montant suffisant pour réparer le préjudice postérieur à la perte de l’emploi et avoir un effet dissuasif à l’égard de l’employeur, le CEDS admettant toutefois qu’il puisse être tenu compte de l’existence de voies de droit alternatives permettant une indemnisation complémentaire. C’est peut-être là une alternative qui pourrait « sauver » le dispositif Français…

Mais preuve en est que le débat est loin d’être terminé !